A la fin de la deuxième guerre mondiale, l’Armée de l’Air française avait besoin d’un transport aérien structuré et fiable.
Alors équipée de moyens hétéroclites (Douglas C47 « Dakota », Junker 52 « Toucan»…), elle réclamait un avion dont les capacités d’emport et les possibilités de parachutage de personnels mais également de matériel lourds fussent à la mesure des missions spécifiques qu’on lui imposait. Pour répondre à cette demande, la Société Nationale de Constructions Aéronautiques du Nord (S.N.C.A.N.) et son chef du bureau d’études Jean Calvy, concevaient dès juillet 1948 un prototype bipoutre et mono fuselage en forme de wagon profilé équipé de deux portes latérales amovibles, qui offrait la possibilité d’un chargement de sa soute à l’horizontale grâce à son train d’atterrissage tricycle et à l’ouverture « en pétale » de sa partie arrière.
Le Nord 2500 n° 01, équipé de deux moteurs Gnome et Rhône 14R de 1625CV décollait pour la première fois le 10 septembre 1949 de Melun-Villaroche, piloté par Claude Chautemps et Georges Détré.
Très rapidement, les essais mirent en évidence les qualités de cet avion et il fut mis en chaîne à Bourges sous l’appellation Nord 2501 NORATLAS en recevant sa motorisation définitive, le Bristol Hercules 759, construit sous licence par la SNECMA. Particularité de ce moteur, il est l’évolution finale d’un moteur en double étoiles de 14 cylindres (2x7) de 38,5 litres de cylindrée, conçu dès 1936 à Bristol selon le principe alors nouveau du moteur sans soupapes à chemises louvoyantes. Sa version Hercules XVI de 1615 CV équipa les bombardiers célèbres de la RAF, le Handley Page Halifax, l’AVRO Lancaster, le Bristol Beaufighter pour ne citer qu’eux. Rustique, solide, autonome, il est alimenté par un carburateur à injection, merveille technique conçue par une femme, Miss Hobson.
Le 28 novembre 1950, Georges Détré et son équipage procèdent au premier vol de la version de série du NORD 2501-01 dont la production tant en France qu’en Allemagne atteindra 426 exemplaires (240 unités assemblées à Bourges par Nord Aviation, et 186 exemplaires à Hamburg-Finkenwerder par Flugzeubau Nord Gmbh (Norflug).
Outre les armées de l’air française et allemande, il équipa les armées grecque, israélienne et portugaise. Il y eut des versions équipées de réacteurs Turboméca Marboré II en bouts d’ailes alimentés en essence au profit de la Marine Nationale et certaines versions civiles exploitées par la compagnie UAT, ancêtre d’UTA, aujourd’hui rattachée à Air France.
D’une masse maximale au décollage de 21,7 tonnes (emport utile de 5 tonnes), il croise à 320 km/h. Non pressurisé mais efficacement défendu contre le givrage, son autonomie de vol proche de 10 heures en conditions limites lui permet de franchir en toute sécurité 2500 km.
Le 29 mai 1954,
22 jours après la chute de Dien Bien Phu,
le groupe ANJOU alors stationné en Indochine
est équipé de ses premiers Noratlas.
Plus tard en Métropole et en Algérie, il équipera toutes les unités opérationnelles groupées au sein du GMMTA (Groupement des Moyens Militaires de Transport Aérien) qui deviendra COTAM (Commandement du Transport Aérien Militaire), puis FAP (Force Aérienne de Projection).
Les Noratlas, affectueusement surnommés la «Grise », fer de lance du transport aérien de l’Armée de l’Air vont sillonner le monde et parachuter sous toutes les latitudes de l’Algérie au Groenland en passant par Suez, de l’Afrique aux Antilles, de Madagascar et la Réunion à la Polynésie française (Mururoa, Fangataufa, Hao, Mangareva…).
Décoller des plus grands aérodromes et atterrir sur des pistes minuscules couvertes de pierres et de sable, refaire leur plein pour une mission humanitaire après une mission de guerre, transporter, transporter, transporter encore jusqu’en 1986, année de son retrait définitif de l’armée de l’air, soit après 32 ans de bons et loyaux services avec de grandes et petites histoires, des joies, des peines et des drames parfois endurés.
De nos jours, il ne reste plus qu’un seul exemplaire au monde en état de voler,
le n° 105.